Ce récit est l’histoire de ma famille pendant la dernière guerre, vu par la fillette que j’étais et écrite pour ma petite fille à la demande de son collège pour que les enfants d’aujourd’hui n’oublient pas les jours sombres que nous avons vécus.
Au début de la guerre mes parents se sont réfugiés à Nîmes, en zone libre, dans un petit studio dont la fenêtre donnait sur une cour carrée et pour voir le ciel il fallait se pencher.
Mon père avait trouvé un modeste emploi de comptable au fond d’un garage. Ma mère ne travaillait pas et nous n’avions pas beaucoup d’argent . Elle s’occupait de moi lorsque je n’allais pas à l’école. J’étais fille unique, j’avais dans les 7 ans et pour m’habiller elle me confectionnait des vêtements dans de vieux habits.
Il y avait des tickets de rationnement et pas grand-chose à manger quand on ne pouvait pas s’acheter du beurre ou un poulet au marché noir, seulement des haricots verts ou des cerises quand c’était la saison. J’étais très maigre et l’on m’avait promis un vélo si je grossissais. Petit vélo que j’ai fini par avoir avec lequel je faisais le tour des arènes de Nîmes. Nous n’avions pas de voiture et très peu de gens en avaient en ce temps là. Je me promenais avec maman jusqu’au jardin de la fontaine où il y avait une grande tour qui dominait la ville, ou bien pour prendre l’air on allait s’asseoir sur la terrasse sur le toit de la maison avec l’accord des propriétaires.
Mon père devait quelquefois aller garder les rails du chemin de fer la nuit afin que personne n’y pose une bombe, s’il y avait eu attentat, il aurait pu être fusillé et à chaque fois c’était l’angoisse pour mes parents.
La sirène retentissait souvent aussi bien le jour que la nuit et l’on se précipitait à la cave pour se mettre à l’abri des bombardements des avions alliés. On dormait presque tout habillé et je n’oubliais jamais d’emmener ma poupée et surtout ma … tirelire. On se retrouvait dans l’obscurité avec les gens de l’immeuble, éclairés juste par une bougie et pour passer le temps ou ne pas entendre les explosions on chantait fort.
Un certain jour, il y eut 300 morts d’un coup si bien que le lendemain depuis un balcon nous avons pu suivre le long et triste défilé de tous ces cercueils.
Comme il n’y avait plus rien à manger, mes parents m’ont envoyée à la campagne en Normandie chez une tante où l’on pouvait mieux s’approvisionner dans les fermes alentour.
J’allais à l’école dans le village. Il n’y avait qu’une seule classe pour petits et grands, filles et garçons mélangés et le maître était sévère. Je n’étais pas toujours sage et je me souviens une fois avoir dissipé les élèves en embrassant un garçon (sur la joue) pendant le cours, ce qui me valut d’être mise au pain sec et à genoux les mains sur la tête au fond de la classe un certain temps !
J’y suis restée six mois, c’était long loin de mes parents, jusqu’à la libération par les américains. Je les ai vus entrer dans le village dans leurs jeeps et nous étions, nous les enfants, joyeux de leur sauter au cou et de quémander quelques chewing gum !
Je ne peux résister à vous faire connaître ce que m’a écrit ma petite fille , à la suite de sa rédaction sur ce sujet : « La maîtresse m’a dit en rendant les copies
– alors, là, Manon … c’est très bien raconté, (forcément puisque c’est toi qui l’a écrit !) j’espère que ce n’est pas un texte copié sur internet ! Je veux bien croire que c’est l’histoire vraie de ta famille. « et ça se termine par un gros OUF !